Le manifeste des économistes égarés dans les couloirs du temps!
Par Denis


L’émergence des bulles financières provient de la mise en place à la fin des années 1970 des politiques de l’offre aux Etats-Unis, en Angleterre, puis dans l’ensemble des pays développés. En baissant massivement les impôts sans pour autant baisser les dépenses (notamment militaires), elles ont permis au secteur privé de disposer de liquidités qui se sont principalement investies dans la finance à défaut d’aller dans l’économie réelle. La foi des gouvernants de ce monde dans l’ordre spontané du marché et la cupidité ont abouti à l’une des crises financières les plus graves que la capitalisme ait connu. Si le constat fait par les économistes atterrés est juste, les solutions qu’ils préconisent seraient, globalement, de revenir à la situation des politiques régulationnistes qui prévalaient dans les années 1960. Or, c’est tout simplement impossible !!!
Deux oublis majeurs qui changent tout
La croissance qui a prévalu dans l’après-guerre s’est construite principalement sur des matières premières obtenues à vil prix du fait de la domination des pays du nord sur les pays du sud. Autrement dit, notre richesse s’est construite par une exploitation sans précédent des ressources géologiques des pays du sud après que nous avons épuisé les nôtres. A la vitesse où nous avons extrait du sol les minerais et à la vitesse à laquelle les pays du sud se développent selon le même modèle énergétique, le spectre de la fin du pétrole est à nos portes. La Bundeswehr dans un rapport datant du début du mois nous prédisait un risque systémique majeur pour 2015. Autrement dit, nos économistes atterrés ont tout simplement oublié deux paramètres qui font que nous ne pouvons pas revenir en arrière : la déplétion des ressources et la surpopulation. De 1960 à aujourd’hui, la population mondiale est passée de 3 milliards à 6.8 milliards d’habitants !!!
Une vision des années 30
Même si certaines propositions de nos économistes atterrés sont justes, elles manquent singulièrement de radicalité. Leur manifeste n’est que le vieux remake de l’opposition des keynésiens envers les néo-classiques et monétaristes qui prévalait dans les années 1930 . A la manière de Roosevelt durant la guerre de 1939-1945, ils évoquent même le retour d’une fiscalité punitive sur les hauts-revenus. Dans leurs propositions, s’ils évoquent justement l’interdiction pour les banques de spéculer pour leur compte propre et le plafonnement des revenus des traders, jamais ils ne parlent de la nécessité du cloisonnement des activités des banques de dépôts et des banques d’affaires. Pas un mot sur le retour dans le giron étatique du secteur bancaire ! Pas un mot sur les marchés à terme ! Pas un mot sur les stocks-options qui travestissent les directions d’entreprises en représentant des actionnaires ! Ils continuent même à croire à la vertu des exonérations pour les entreprises à la condition qu’elles soient assorties de création d’emploi. Ils parlent même sans le dire explicitement d’un retour au protectionnisme par la mise en place d’accords bilatéraux.
Un autre cap est possible !
Le 16 août, Yves Cochet signait dans le journal Le Monde un texte dans lequel le député vert évoquait des pistes un peu plus sérieuses eu égard aux enjeux qui sont devenus les nôtres. Il préconise notamment une baisse drastique du temps de travail à 28 heures par semaine, assortie d’un revenu d’existence élevé, universel, inconditionnel et individuel. Ajoutons-y, comme l’a évoqué Henri Sterdyniak sur l’antenne de France Culture, une baisse des dépenses militaires au profit de l’éducation. Le chômage dans notre pays touche 4.5 millions de personnes. Aux Etats-Unis, c’est bientôt 20% de la population active qui pourrait être au chômage. Autrement dit, préférons la décroissance choisie à la décroissance subie que nous imposent la vision d’économistes libéraux et sociaux-démocrates, enfouie sous une énorme couche de poussière.

Crédit photos : Pole-Emploi.org, Buzzécolo
J’adore la dernière phrase de cet article ! C’est frappé au coin du bon sens… mais malheureusement le bon sens est une qualité devenue très rare. Quel dommage !
Le marasme actuel est voulu, il fait peur et calme les moins privilégiés, tandis que les plus privilégiés sont bien à l’abri, pour l’instant…
Qui vivra verra !
Le rapport de la bundeswehr (http://petrole.blog.lemonde.fr/2010/09/02/peak-oil-rapport-cinglant-de-larmee-allemande-revele-par-der-spiegel/) nous avertit que « une certaine probabilité pour que le Peak Oil se produise aux alentours de l’année 2010, et qu’il ait des conséquences sur la sécurité dans un délai de 15 à 30 ans ». Et qu’outre les dégâts écologiques, économiques, et les tensions qu’engendreront très rapidement une baisse de production, cela modifiera très rapidement aussi des changements dans la géopolitique mondiale.
Le pétrole intervient directement ou indirectement dans la production « de 95 % des biens industriels », nous dit Der Spiegel.
Mais nous ne faisons rien, ou bien trop peu, et nous continuons à échouer lamentablement dans toutes conférences nationales et internationales. Et que l’on renonce à investir aujourd’hui dans les structures de demain. On préfère encore se rendre au salon de l’auto, en rêvant que la voiture électrique est l’avenir, rêver à un retour de la croissance, rêver d’un retour des valeurs traditionnelles du travail, nous ne serions que dans une mauvaise passe mais on voit le bout du tunnel (Ah, l’optimisme de C. Lagarde me remonte le moral chaque fois qu’elle s’exprime – qu’est-ce qu’on se fend la pouire ;) ). Le mur, on ne s’en rend pas compte parce qu’on le voit, là , bien en face de nous, mais quand quand on se le prend vraiment dans le gueule. Ah, zut, c’était un mur, j’ai cru que c’était une projection.
Pour ce qui est d’un retour au Glass-Steagall Act, abrogé en 1999 (merci monsieur Clinton, merci aussi à M. Fabius, M. Balladur, qui nous ont permis de faire avancer notre secteur bancaire vers la modernité), des économistes prônent un retour à des outils et des systèmes cohrents et transparents :
Frédéric Lordon (http://www.larecherchedubonheur.com/article-frederic-lordon-le-cadre-de-la-finance-internationale-doit-etre-radicalement-refondu–38190606.html) se prononce clairement pour le rétablissement de la respéciailsation des banques, et plus radicalement “Il faut ramener les banques à des choses rudimentaires – des produits d’épargne simples – et peu rémunératrices.” Qu’on garde les plus maladroits des traders, au moins on devra ne leur confier que des choses assez simples”, ajoute-t-il.
Et politiquement le constat est sombre : “La faillite des médiateurs politiques, médiatiques, syndicaux est totale. Les salariés sont abandonnés sans aucune perspective d’ensemble.”
On peut lire aussi les écrits de Paul Jorion qui prône aussi la mise en place du Glass-Steagall Act : http://www.pauljorion.com/blog/?p=13114
Génial comme blog
Je t’ai mis en lien sur le mien
A bientôt
Aurelinfo
http://aurelinfo.over-blog.com/
@nono
Cela fait longtemps que cette question est très largement évoquée dans Voie Militante.
-> http://www.voie-militante.com/international/monde/debut-de-la-fin-du-petrole-cest-pour-2015/
-> http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/le-chaos-pour-2015-81009
J’en ai parlé dès le 22 avril 2009 : http://www.voie-militante.com/?s=%22michel+mallet%22
J’épouse totalement les thèses d’Yves Cochet sur cette question. Doit-on tout dire ? Peut-on tout dire ?
Disons qu’on attendait (diplomatiquement) le pick oil pour 2015 (même si tout le monde sait que les réserves sont largement sur-évaluées, les émirats comptant dans leurs réserves le pétrole déjà exploité – formidable, on a beau extraire, il reste toujours la même quantité), là l’article du très sérieux Der Spiegel met les pieds dans le plat.
Donc il y avait les Cassandre d’un côté, et les gens sérieux qui rassuraient : « meuh, non, on n’y est pas, on a le temps de voir… »
Maintenant, c’est devenu sérieux au point de commencer à laisser fuiter dans le public, et donc on va ?…
Oula, la pénurie va avoir bon dos. Et après on pourra toujours dire « meuh on ne savait pas, comment aurait-on pu savoir ? »
Ca va t’intéresser Denis : les économistes atterrés se réunissent à Paris le 9 octobre
http://economistes-atterres.blogspot.com/2010/09/manifeste-des-economistes-atterres.html
ah, trompé de lien, dsl ;)
C’est là :
Colloque d’économistes atterrés / 9 octobre 2010
Faculté des Sciences pharmaceutiques et biologiques
4, avenue de l’Observatoire, 75006 Paris
et c’est là :
http://www.mediapart.fr/journal/economie/250910/crise-les-economistes-atterres-se-rassemblent-le-9-octobre
@nono
Et vive DSK en 2012 ? Nous aurons alors avancé d’un grand pas, n’est-ce pas ?
Y a quoi en 2012 ?