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Europe-Ecologie-Les Verts : Puisque ce n’est pas autrement, ce sera sans moi…

Par      • 5 Déc, 2010 • Catégorie(s): Ecologie  Ecologie    

Fabienne LarrivièreEurope-Ecologie-Les Verts n’a rien de révolutionnaire dans ses pratiques politiques. Il n’y a pas plus de révolution ici que dans le remaniement du gouvernement Sarkozy. On reprend les mêmes, on y mélange quelques opportunistes, on élimine les idéalistes et surtout, on ne change rien aux vieilles méthodes du système oligarchique existant.

EELV fait exactement comme les autres : de la politique spectacle.

L’écologie peut-être mais sans l’éthique

Engagée dans le mouvement depuis les Européennes avec la ferme volonté de faire de la politique autrement, je constate qu’aujourd’hui l’objectif n’est pas atteint.

Bien sûr, EELV brandit l’étendard de l’urgence écologique et sociale toutefois, ce rassemblement a perdu en cours de route les notions d’éthique primordiales pour redonner du crédit au monde politicien. Au lieu de créer une véritable coopérative, une structure innovante, ce soi-disant OVNI de la politique s’est métamorphosé en un parti traditionnel se servant d’un réseau de coopérateurs/trices… rien de nouveau sous le soleil de notre pays.

Dans un concept coopératif, il y aurait eu un partage équitable des droits et des devoirs de chacun(e), une interactivité avec la possibilité d’une évaluation réciproque des deux structures. C’est l’inverse qui s’annonce avec tout contrôle au politburo sur le parti comme sur le réseau coopératif. Ce dernier sera pris en otage par des apparatchiks et cautionnera des pratiques en désaccord avec ses valeurs. Ce qui est acté dans les statuts ressemble plus à un rôle d’outil que de partenaire.

On peut rêver que l’on va changer la donne avec le règlement intérieur et les statuts régionaux… oui, on peut rêver comme je l’ai fait en rejoignant Europe-Ecologie pour les Européennes cependant, la réalité m’a rattrapée et me conseille la prudence.

A citron trop pressé ne reste que les pépins.

Comme la plupart du militant (e)s écolo antisystème, je ne suis pas « embrigadable », goutte d’eau dans une fuite permanente de sympathisants depuis les Européennes. Combien sont déjà parti(e)s, combien le feront encore ?

Premiers sacrifiés sur l’autel de la politique politicienne : les associatifs aux Régionales, relégués en fin de liste voire même hors-listes pour céder leur place aux opportunistes pros de ces tactiques qui, bien évidemment, s’associent immédiatement avec les manipulateurs de manettes.

Et depuis, les déçu(e)s se multiplient, s’y ajoutent à présent les adhérent(e)s Verts qui avaient vu en Europe-Ecologie une bouffée d’oxygène pour qu’enfin, leurs dirigeant(e)s appliquent en interne les valeurs qu’ils/elles défendent à l’extérieur dans les instances où ils/elles siègent et dans leur communication aux médias.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes…

Nous étions environ 26 000 au départ, puis 13 000 adhérents au processus, et quand il a fallu voter, il n’en restait plus que la moitié… on se gargarise avec des résultats de république bananière alors que les scores sont à diviser par deux. Ainsi, tout ce qui est soi-disant validé ne l’est en réalité que par une minorité.

Comment se fait-il que dans un mouvement politique on retrouve la même proportion d’abstention que dans la société ? Comment se fait-il alors que l’enquête sur les signataires et adhérents d’EE annonçait des personnes prêtes à s’engager, elles n’aient même pas pris la peine de voter ? Pourquoi tous/tes ces militant(e)s de l’écologie politique ont-ils/elles renoncé ? Que s’est-il passé entre-temps ?

EELV victime d’abus d’ivresse de pouvoir

Le déni de démocratie participative au cours du processus constituant a de toute évidence une grande part de responsabilité.

Je ne vous citerai pas tous les dysfonctionnements internes qui m’ont choquée, ce serait bien trop long. Néanmoins, trois points parmi tant d’autres sont inadmissibles :

  • Le non-cumul des mandats qui n’est absolument pas respecté avec des individus que l’on retrouve partout, monopolisant toutes les responsabilités. J’ai voté en faveur des eurodéputés et des conseillers régionaux EE pour qu’ils se consacrent ENTIÈREMENT à leur mission et non pas pour qu’ils prétendent désormais à des fonctions en interne et désertent les Assemblées où ils doivent siéger ! Qu’ils respectent leurs promesses de campagne (être à 100% sur leur mandat). Certain(e)s le font, d’autres pas. Sur le plan local et surtout en Languedoc-Roussillon qui est la région Europe-écologiquement sinistrée, le fonctionnement est très oligarchique avec des baronnies singées sur le PS de Navarro et cie.
  • EELV est, à mon grand regret, un parti écolo de bobos ! Je l’avais déjà remarqué avec les tarifs pratiqués sur les activités (Journées d’Été, buffet des réunions, tee-shirt et matériel de propagande VENDUS aux militants, le remboursement des frais au bon vouloir du caissier local…) mais cela se confirme avec la grille tarifaire des adhésions. Premier prix pour les précaires 36 €, un gros trou dans le budget des plus démuni(e)s qui n’étant pas imposables n’auront droit à aucune déduction fiscale alors qu’un salarié à 1400 € paiera 33 € après sa déduction. En ce qui concerne les questions sociales, EELV a encore du chemin à parcourir.
  • L’absence de transparence et notamment, des finances qui laissent libre au cours aux pires rumeurs concernant l’utilisation du budget. On sait à peine comment l’argent rentre mais on ne sait rien de comment il ressort. Sujet tabou, dossier top secret. Malgré tout, les nouveaux statuts avancent d’un petit pas sur cette question. Ceci dit on aura compris que tout ce qui est écrit n’est pas systématiquement appliqué dans un parti politique.

Pour l’instant, je vois un fonctionnement plutôt capitaliste dans l’organisation de ce mouvement : système pyramidal, décisions et responsabilités monopolisées par une élite, non-transparence des finances, rétention d’information, manipulation et exploitation des militants, abus de pouvoir…

J’espère que les militants de l’éthique adhérent(e)s ou coopérateurs/trices auront assez d’énergie positive pour que EELV devienne concrètement une coopérative politique.

Quand on a le nez dans le nombril, on ne voit plus l’horizon

Peut-être le noyau dur des Verts n’était-il pas assez mûr pour relever le défi ? Quand on écoute les vrai(e)s Verts comme ils s’appellent, les militant(e)s de base, socle de la pyramide, ils/elles dénoncent les dérives politiciennes dans lesquelles leurs pharaons les ont entraînés. Le pouvoir serait-il systématiquement un engrenage privilégiant l’intérêt aux idées ? Le pragmatisme a bon dos !

Quand les conseillers/ères Europe-Ecologie-Les Verts tout fraîchement élu (e)s en Ile de France s’associent avec Valérie Pécresse contre Jean-Paul Huchon dans le but d’adopter une motion leur permettant d’améliorer leurs indemnités (garde d’enfants lors des sessions de nuit) que font-ils/elles en réalité ? Quelle avancée sociale ou féministe ? Les élu(e)s sont-ils des personnes en difficulté financière ? N’aurait-il pas été plus judicieux pour être réellement dans une initiative du bien commun de demander au Conseil Régional d’IDF un soutien financier pour les femmes travaillant la nuit et élevant leurs enfants seule ? Ces « big boss » dans leur tour d’ivoire, n’ont-ils pas conscience de la souffrance et de la misère touchant les familles mono-parentales ? Nous avons été plusieurs à nous offusquer de cette malheureuse initiative de nos élu(e)s, nous l’avons communiqué sur nos listes pourtant, personne ne s’en est expliqué.

Nous les idéalistes, nous avons probablement demandé l’impossible à nos responsables et en bon(ne) politicien(ne), ils/elles nous ont dit : «oui, oui…» puis, ils/elles ont agi selon leur profit. Après tout, ce n’est pas facile pour un membre privilégié de la société de remettre en question son système, ce serait scier la branche sur laquelle ils/elles sont confortablement assis(es). Faire de la politique autrement, c’est revoir le statut de l’élu(e), des cadres des partis et alors là, on touche un dossier sensible où ils/elles sont majoritairement d’accord pour la préservation de leurs privilèges.

Peut-être que pour faire de la politique autrement, il faut le faire en dehors d’un parti ? Dans un mouvement citoyen indépendant ? Une enquête* sur l’électorat Europe-Écologie révèle que 61 % des sympathisants privilégiaient cette idée à celle d’un rattachement à un seul parti.

Autonome plutôt qu’automate

Plutôt que de s’éparpiller dans la Nature comme c’était le cas jusqu’à présent, pourquoi ne pas se rassembler afin de poursuivre la dynamique lancée. Nous avons tissé des liens entre nous, créé des réseaux, nous maitrisons les outils de structuration. Donnons-nous les moyens de notre liberté de parole et d’action. En sortant d’une machine électorale, nous pourrons non seulement nous consacrer à l’essentiel sans subir les conflits d’intérêts mais en plus élargir la portée de nos revendications aux autres partis.

Face à l’urgence sociale et environnementale, à l’ampleur du chantier, nous avons nous aussi, idéalistes de l’écologie politique, une responsabilité et EELV n’a pas le monopole du sujet, il est un outil parmi tant d’autres.

Parallèlement, le réseau coopératif d’EELV et des adhérent(e)s du parti vont entrer en résistance avec la volonté de faire évoluer de l’intérieur. Pour l’avoir vécue, je sais que le combat sera rude. Il faut être courageux et tenace pour être militant politique, il faut aussi accepter de perdre énormément d’énergie pour rien, à se battre contre des moulins à vent. Le comble de l’ironie pour un écolo ! En conséquence, une parole libre et forte pouvant faire pression de l’extérieur ne peut que les aider.

Un pied dedans, un pied dehors est la solution pour que nos idées avancent de tous les côtés. N’est-ce pas cet objectif le plus important pour nous ?

Faut-il être au bord du précipice pour ouvrir les yeux ?

La désertion massive des déçu(e)s, les revendications des militants, les sanctions se profilant aux prochaines élections, la rébellion grandissante des peuples face aux injustices finiront-ils par déverrouiller la conscience des dirigeants d’EELV dont nous attendons qu’ils/elles montrent l’exemple ?

Où est-elle actuellement, notre ambition d’inventer une autre voie réconciliant tous/tes les dégoûté(e)s de la droite comme de la gauche sur la base d’une écologie politique chamboulant les traditions, offrant aux électeurs un autre choix. Le peuple français en avait besoin malheureusement, le message n’est pas passé. Les responsables d’EELV n’ont pas réalisé l’enjeu. Pour cela, ils auraient dû être plus à l’écoute de celles et ceux qui sont sur le terrain pendant qu’ils/elles se pavanent sur les cimes du pouvoir. Au contraire, la locomotive s’est dirigée tête baissée dans sa voie de garage habituelle, à la remorque du PS. Bien sûr, on peut fanfaronner avec les chiffres aux dernières élections, la montée en puissance des mouvements écolos et exiger plus de places à ses partenaires et après…

EELV sera-t-il convaincre les abstentionnistes ? Que fera l’électorat écœuré par ces sempiternelles manipulations politiciennes ? Et l’écologie sociale, environnementale et éthique deviendra-t-elle réellement la priorité de notre pays ?

Permettez-moi d’en douter !

Demain, ailleurs, le combat continue…

Dans l’immédiat, je sais que mon témoignage va soulever des animosités, probablement moins que des amitiés. La plupart retrouveront dans mes propos des vérités qu’ils/elles subissent au quotidien. D’autres se sentiront blessé(e)s d’être remis(e) en cause. C’est ainsi dans la vie, il y a toujours des vérités qui fâchent.

La transparence est un des principes de l’écologie politique, je me sens donc en harmonie avec mes valeurs. D’autant plus, qu’Eva Joly, le symbole EELV de l’éthique juge dans un article du Point sur Wikileaks que les révélations font partie du « débat démocratique ». Sachant qu’elle est déjà fort occupée, oserai-je la solliciter pour au moins initier un balayage devant la porte ? Au point où j’en suis, après tout ?

Fabienne Larrivière
Militante autonome de l’écologie politique
Présidente de la Lesbian & Gay Pride Montpellier de 1998 à 2008

* Enquête sur l’électorat Europe-Ecologie de Denis Pingaud – Jean Jaurès Fondation

Contacts : fabienne.larriviere1[@]libertysurf.fr
Site : www.nightbirdlife.com

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34 Réponses »

  1. ne le prend pas mal : on peut remplacer EELV par PS dans ce texte, a part les 36€ de cotisation minimale.
    Un mot manque « crédibilité » en effet comment peut on croire des gens qui ne respectent pas leurs petits engagement, quand ils nous disent vouloir changer le monde ?
    Comme dit le proverbe, quand on veut grimper à un arbre on évite d’avoir le cul sale.

  2. @dagrouik

    Je crois que le mal est profond, très profond. J’ai souvent parlé, naguère, de Tonio Negri et du mimétisme des organisations politiques avec la société. Les partis sont à l’image de la société. J’ai lu tes deux billets sur Lang et Emmanuelli qui soutiennent Laurent Gbagbo. Tu as eu raison, je crois, de quitter le Parti Socialiste et de tels guignols qui souillent la gauche de leur pensée minable !

  3. Toute ressemblance avec un mouvement politique ayant pu exister est totalement fortuite.

    D’un rêve: l’écologie politique, nous sommes passés au cauchemar : l’écologie politicienne
    Ce n’est pas la république qui fait les hommes mais les hommes qui font la république

  4. @ Fabienne Larrivière :

    J ai pas lu parce que je sais que y a plein de gens que vont te dire que t’as rien compris !
    Et comme j aime pas qu ‘on critique mon amie !!!

    Mais si il y a quelqu’un qui te manque de correction, je tel a Josh R

    bise

    Gildas

  5. Pour Fabienne,

    Au début chez les verts c’est BWV 565 et à la fin c’est BWV 244

    liens :

    http://www.youtube.com/watch?v=IVJD3dL4diY
    http://video.google.com/videoplay?docid=2967509336812208291

    et si tout cela se finissait un vendredi ?

  6. @virginie,

    la version complète de BWV 244 :
    http://www.youtube.com/view_play_list?p=B3676F095049C019

    cf commentaire n° 17

    concernant la tournure des choses, les 2E frais risquent de se transformer
    en H2S avec le temps ….

  7. @vert chez toi

    lier les droits aux devoirs voilà une belle idée
    belle expression de droite et de gauche
    donc écolo

    principal droit citoyen : la liberté d’expression
    devoir obligatoire du citoyen : fermer sa gueule

    @ fred

    tu vois le plus difficile c’est de changer l’homme pas les institutions

  8. @Jean-Yves

    Total accord ! Ce en sont pas les institutions qui sont en cause. C’est l’absence d’autonomie des hommes et des femmes à les subir.