Propositions sur la segmentation de l’offre en matière de vin
Par Denis


Réorganisation de l’offre
Le vin doit rester ce qu’il est, à savoir un » produit exclusivement issu de la fermentation du raisin ou du moût frais de raisins » .
L’émergence d’une concurrence mondiale forte doit amener à une refonte totale de l’offre de vins français. Elle ne doit pas nous amener à singer des pratiques oenologiques qui nous feraient nous placer irrémédiablement dans un schéma de concurrence pure et parfaite.
Ne rien faire serait aussi nous condamner. La segmentation actuelle autour des vins de tables, des vins de pays et des AOC n’a plus de sens. Elle n’est plus audible sur le marché de l’exportation et sur le marché national. L’offre doit se réorganiser autour de deux segments.
Vins de France
Fusion des segments Vins de tables et Vins de pays, la dénomination Vins de France doit permettre de fabriquer des vins de cépages spécifiques comme le font déjà les Australiens et bien d’autres pays. Il est d’ailleurs paradoxal que les pays étrangers aient su mettre en oeuvre un type de production qui est né en Ardèche dans les années 70. Tout en respectant la qualité, ce type de vin doit permettre l’industrialisation d’un secteur qui est voué à mourir face à l’offre des pays émergeants. Cette appellation doit permettre d’avoir des vins audibles sur le marché de l’export et de relancer la consommation de vin y compris sur le marché national.
Pour pouvoir être audible, il faut aussi être crédible sur le plan de la qualité. Les pratiques de désalcoolisation ont pour objectif de favoriser les industriels en captant l’essentiel de la valeur ajoutée du secteur viti-vinicole. Peu respectueuses du développement durable du fait d’une consommation d’énergie importante, elles doivent être condamnées et interdites par un organisme de contrôle aux pouvoirs renforcés. L’utilisation massive de traitements et d’intrants autour de la production du vin doit amener à orienter le secteur vers les logiques de préservation de l’environnement. Il faut, en revanche, peut-être autoriser, en l’encadrant très strictement, l’utilisation des copeaux de bois. Le rendement à l’hectare des productions incorporées aux Vins de France doit être sérieusement revu à la baisse afin de préserver la qualité et le revenu des viticulteurs. Ces contraintes doivent être intégrés aux spécifications de l’appellation Vins de France.
Les AOC
Le cadre actuel doit rester la base. Il faut lui ajouter des règles strictes en matière d’utilisation d’intrants et de traitements fongicides et pesticides dont l’utilisation intensive amène une baisse conséquente du revenu viticole. A l’interdiction de désalcoolisation, doit se superposer celle de l’utilisation de copeaux de bois. Les parfums qui peuvent y être incorporés, même s’ils peuvent répondre à une logique de consommation, s’opposent à la logique de spécificité du terroir. L’AOC doit rester la rencontre de cépages, d’un terroir et de méthodes de vinification issues de l’expérience des hommes.
De façon à être audible sur le marché de l’export, il ne faut pas hésiter à faire apparaître, sur l’étiquette, les principaux cépages utilisés. Afin de les distinguer des Vins de France, la mention « De qualité supérieure » pourrait être associée à l’étiquette. Le producteur doit pouvoir commercialiser sa production en appellation Vins de France au cas où elle ne respecterait pas les critères de l’appellation. L’interdiction de déclassement amènerait à accepter la logique de destruction de la récolte. Elle supposerait la mise en oeuvre de mesures de soutien fort coûteuses sans permettre une réelle adaptation économique du secteur viti-vinicole.
Réorganisation des organismes de contrôle et des interprofessions
Face à la crise du secteur du vin, il convient de réorganiser les organismes de contrôle et de promotion.
Une INAO dédiée au vin
Le contrôle est aujourd’hui assuré par l’INAO dont la mission n’est pas spécifique au secteur du vin. La réforme de la segmentation de l’offre doit s’accompagner de celle des outils de contrôle et de régulation. Dilué dans de très nombreuses problématiques, l’INAO doit confier l’ensemble de ses compétences et de ses missions sur le domaine du vin à un office de contrôle spécifique au vin chargé d’appliquer les normes attachées aux Vins de France et aux AOC. Cet organisme doit rester sous le contrôle strict des autorités publiques et du Ministère de l’Agriculture. Son pouvoir de contrôle et de sanction doit être renforcé pour permettre une plus grande « loyauté » de l’offre vis à vis des consommateurs. Il n’a pas pour rôle de déterminer les normes et les appellations.
Les interprofessions chargées de la promotion du vin doivent sortir du champ du ministère de l’Agriculture et de l’État, de la logique du contrôlé contrôleur ou du contrôleur contrôlé. Elles doivent être financées par des cotisations volontaires des industriels et des producteurs du secteur. Elles n’ont pas pour rôle de déterminer les normes, les modes de régulation. Dans ce cadre, l’existence de Viniflor serait clairement remise en cause.
Une haute autorité de la vigne et du vin
La détermination des contours des segments de l’offre, des appellations doit revenir à une Haute Autorité de la Vigne et du Vin composés de représentants de l’INAO et/ou des ministères de l’agriculture et du développement durable, de représentants de consommateurs, de producteurs, de syndicats, de juristes, d’oenologues, de parlementaires et de représentants de Conseils régionaux. Elle doit être l’instance qui détermine les règles en matière de production viti-vinicole. Le vin est une affaire trop importante pour être confié aux producteurs.